“Une palette végétale XXL pour la ville de Saint-Ouen !”
Un consortium d'entreprises du paysage, dont une équipe de Lachaux Paysage dirigée par Marc Lartigau, met actuellement la dernière touche au Grand Parc de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), appelé à gérer les eaux de la Zac locale en construction tout en offrant un poumon vert et ludique aux habitants.
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Le quartier des Docks, à Saint-Ouen (93), verra réellement le jour à l'horizon 2020. Mais sa genèse a débuté par l'inauguration, au début du mois de décembre 2013, de son poumon vert, le Grand Parc. Sur 100 hectares (le quart du territoire de la ville), la Zac doit accueillir, à terme, 5 000 emplois, mais aussi 15 000 habitants. Pour une cité qui compte actuellement 47 000 âmes, l'enjeu est de taille. Du coup, les élus ont voulu des réalisations exemplaires : bâtiments chauffés par une usine de traitement des déchets, gestion des eaux pluviales sur place, « zéro phyto » ou gestion des déchets en souterrain, entre autres.
Le nouveau parc assure la gestion de l'eau du quartier : quand la Zac sera entièrement construite, l'ensemble des eaux de ruissellement seront collectées dans ses deux bassins reliés entre eux et totalisant une surface de 14 800 m². L'eau y est pompée vers des jardins filtrants où elle est épurée, puis elle parcoure les jardins en cascade pour être oxygénée. Elle revient alors dans les grands bassins, puis est évacuée vers la Seine si le niveau de l'eau est trop important. Une partie de l'eau est prélevée et stockée dans une cuve enterrée pour l'irrigation des jardins partagés. À noter qu'en cas de gros orage, il a été prévu que les 12 ha du parc soient, en quasi-totalité, inondés. Les eaux grises de la serre pédagogique (voir l'encadré) sont filtrées dans des bassins spécifiques avant de rejoindre celui de stockage. Les bassins sont conçus dans le prolongement des pelouses mais ils s'arrêtent, en bordure de parc, contre des murs en gabion dans lesquels des plantes rustiques ont été intégrées : cymbalaire, Sedum, valériane rouge... Ces plantes, cultivées dans des pots de type Fertilpot carrés de 10 cm de côté et de 18 cm de profondeur, ont été mises en place entre les pierres et elles sont amenées à se développer sur la surface verticale grâce à des poches de substrat réparties dans l'épaisseur du mur. « L'étanchéité du fond des bassins a été réalisée avec un film de PEHD (polyéthylène haute densité) de 1,5 mm d'épaisseur », explique Marc Lartigau, chef de secteur de l'entreprise Lachaux Paysage, qui réalise les travaux de création. « Une couche antipoinçonnement a été installée dessous et dessus, le tout étant ensuite recouvert soit de 30 cm de terre dans laquelle sont plantées des aquatiques, soit de sable. Dans deux ou trois ans, ces bassins devront commencer à être vraiment entretenus. Il faudra faucarder, mais si l'objectif reste de maintenir une biodiversité maximale, il faudra certainement éviter que les espèces les plus vigoureuses ne prennent toute la place. Il sera alors probablement nécessaire d'en arracher certaines là où elles sont trop envahissantes », poursuit le chef de travaux.
Les bassins de collecte d'eau forment un « L ». Ils bordent le parc côté ouest et en partie côté nord. Au coeur de ce « L », le parc se divise en bandes orientées nord-sud : une grande pelouse, une zone de jeux, une allée principale dite allée des chênes, une prairie, des jardins en cascade, des jardins partagés, et enfin une zone mixte avec une aire de jeux, de glisse et un amphithéâtre pour organiser des spectacles en extérieur.
La grande pelouse a été plaquée en 2013 sur une couche de substrat élaboré type Lavaterr, mis en oeuvre sur un mélange terre-sable de Loire-compost de 25 cm d'épaisseur. Elle relie les bassins à l'allée des chênes, sur laquelle 50 Quercus cerris seront plantés en 60/70 (pour 10 à 12 m de hauteur) au printemps prochain. Les planter à l'automne ne leur est pas favorable. Les arbres ne seront pas tuteurés, les mottes seront ancrées au sol avec le système Végéfix.
La prairie accessible au public a pour sa part été semée à partir d'un mélange fourni par Phytosem. « Mais comme le maître d'ouvrage voulait que la zone soit verte rapidement, nous avons additionné à ce mélange, qui se sème à raison de 5 g/m², un peu de ray-grass anglais qui disparaîtra quand les espèces les plus pérennes se développeront. Il se dissipera d'autant plus vite que nous l'avons semé à 20 g/m2 seulement et que nous ne le tondrons pas », précise Marc Lartigau.
Les prairies, accessibles ou non, enserrent les jardins partagés qui, à leur extrémité, accueillent une serre pédagogique. Les jardins partagés sont mis à disposition de trente anciens ouvriers d'Alsthom qui y occupent une parcelle d'environ 80 m² (voir l'encadré). Ils accueillent par ailleurs une centaine d'habitants de la ville « qui ne disposent pas de jardin chez eux et acceptent de cultiver sans pesticides. Une pratique toutefois pas toujours évidente car les jardiniers restent très marqués par l'usage des produits phytosanitaires », explique Mathieu Glaymann, le directeur du parc. C'est aussi dans cette zone que les ruches d'une association locales ont trouvé leur place : comme la plupart des espaces verts aujourd'hui, le Grand Parc de Saint-Ouen a vocation à accueillir les habitants pour la détente, mais aussi pour faire redécouvrir les aspects vivriers de la terre, la biodiversité, etc. Une programmation désormais bien connue mais qui s'impose comme une évidence au coeur d'un écoquartier...
Finalement, les problématiques les plus marquantes pour la réalisation de ce parc auront été de deux ordres : gérer les déblais et remblais, et réaliser des substrats adaptés à chaque zone. En tout, la société Coteg, chargée des terrassements généraux, a nivelé et trié près de 100 000 m3 de déblais. Les terres polluées ont été traitées dans des centres spécialisés. Environ 27 000 m3 ont été réutilisés directement sur le parc. « Pour réaliser les diverses parties du lieu, nous avons dû mettre en oeuvre onze substrats différents : pour la pelouse, les prairies, les jardins filtrants, voire des mélanges de terre et de pierre pour les fosses de 12 m3 qui accueilleront au printemps les chênes de l'allée centrale », précise Marc Lartigau.
Indépendamment de la participation des habitants, on retrouve dans cette réalisation une autre tendance forte : le choix d'une palette végétale plutôt naturelle. L'agence TER, qui a conçu cet endroit, a choisi de privilégier les espèces types. Outre les chênes qui marqueront, dès le printemps prochain, l'allée centrale, on trouve nombre de fruitiers, de prunus d'ornement (Serrula avec son écorce qui se desquame, le Mahaleb type...), beaucoup d'arbres en cépées. Les zones d'arbustes et de vivaces, très nombreuses, ont toutes été paillées soit avec des fibres d'écorce de peuplier, soit à partir de produits biodégradables largement composés de fibres végétales (jute, sisal). Enfin, les berges des jardins en cascade ont été protégées par un géotextile en coco pesant 700 g/m2 qui maintiendra les berges pendant quatre à six ans. « D'ici là, l'ensemble des vivaces et des aquatiques qui bordent ce cours d'eau entièrement artificiel auront largement couvert les pentes. Tout comme l'ensemble de la palette végétale XXL (plus de 100 000 plantes) l'aura fait sur les 12 ha du Grand Parc de Saint-Ouen... », conclut Marc Lartigau.
Pascal Fayolle
La zone des Docks de la ville de Saint-Ouen ne compte plus beaucoup d'usines aujourd'hui, mais le nouveau parc, situé au coeur d'une Zac, doit drainer à terme 5 000 emplois et pas moins de 15 000 habitants.
Cinquante Quercus cerris seront plantés dans l'allée centrale du parc au printemps.
Au cours de l'année 2013, 35 000 plantes vivaces et 73 000 aquatiques, fournies par l'entreprise Akène comme l'ensemble de la palette végétale, ont été plantées.
Pour réaliser les diverses parties du parc, les entreprises ont mis en oeuvre pas moins onze substrats différents.
Une noue paysagère jouxte les 5 000 m² de jardins partagés, dont une partie a été réservée à trente anciens ouvriers d'Alsthom, qui disposaient déjà de jardins familiaux sur le site.
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